Le député haut-alpin se montre pessimiste pour la ligne Grenoble-Gap. Mettant tout sur le dos de la SNCF, il étale au grand jour son impuissance et celle du Gouvernement. De fait, l’État reste muet ou se déclare « incompétent » sur le dossier. Y a-t-il encore quelqu’un qui décide au ministère des Transports ?
Communiqué – lundi 28 octobre 2019
D’abord, rappelons les faits. Le comité de pilotage de la dernière chance prévu le 22 octobre à Grenoble a été annulé en dernière minute, rendant peu probable la réalisation de la promesse du secrétaire d’État aux Transports de faire les travaux urgents sur la ligne Grenoble-Gap en 2020. Contrairement aux allégations des préfets de l’Isère et des Hautes-Alpes, ce comité de pilotage traite habituellement, entre autres sujets, de la ligne Grenoble-Gap (voir les deux dernières pages de notre document). La préfecture de l’Isère a déclaré n’être « pas compétente » dans ce dossier. Après l’échec du comité de pilotage en préfecture des Hautes-Alpes le 26 septembre dernier, le Collectif recherche donc une préfecture « compétente » pour mettre en œuvre les promesses du Gouvernement ! C’est dans ce contexte qu’intervient le texte adressé par Joël Giraud à la rédaction du Dauphiné libéré mercredi et repris partiellement dans l’édition du quotidien le lendemain.
Une musique funèbre à déconstruire
En moins d’un mois, c’est la deuxième fois que le député marcheur des Hautes-Alpes se fait (à son corps défendant) porte-parole d’un Gouvernement obstinément muet, en distillant une musique funèbre pour la ligne Grenoble-Gap. Auprès du Collectif, Joël Giraud assure : « nous sommes un noyau d’élus qui veulent sauver cette ligne ». Il a d’ailleurs signé l’appel à rassemblement du 9 novembre. Mais il se plaint que selon SNCF Réseau, si les travaux annoncés par le Gouvernement pour 2020 (dans six mois) sur Grenoble-Gap étaient réalisés, « ceux sur la ligne de Valence seraient retardés ». Il oublie qu’en principe, ce type de travaux est programmé au moins deux ans en avance pour les préparer dans de bonnes conditions. Et que SNCF Réseau demande à l’État de les financer… depuis 2017, sans succès ! Contacté par le Collectif, le député affirme que SNCF Réseau fait « tout pour prouver que les travaux d’urgence sont impossibles à réaliser ». Mais dans ce cas, comment expliquer la promesse du secrétaire d’État il y a à peine plus d’un mois ? Avait-il mal préparé son dossier, ou savait-il déjà que sa promesse ne pourrait pas être tenue ?
1. Selon le député, la ligne Grenoble-Gap va fermer fin 2020 :
« Plus on avance, plus il est sûr que SNCF Réseau va gagner le bras de fer en rendant techniquement impossible le maintien d’un service même dégradé sur la ligne en 2021 ». FAUX : la direction de SNCF Réseau en charge du dossier a indiqué au Collectif avoir proposé plusieurs scénarios. L’un d’eux permettrait de faire les travaux urgents en 2022, sans fermeture préalable de la ligne. Contacté par le Collectif, le député explique : « ni moi-même ni le cabinet du Ministre ne sommes au courant de ce scénario. Alors si c’est une information interne à la SNCF, il faut qu’elle soit diffusée y compris au Ministère ». Problème : c’est chose faite depuis plus d’une semaine. Et ça fait bientôt un mois que le Collectif demande des RDV avec un représentant du secrétaire d’État aux Transports, sans réponse. Comment comprendre que cette information, obtenue par un collectif citoyen, ne parvienne pas au Gouvernement, autorité de tutelle de l’entreprise ?
2. Selon le député, le blocus ferroviaire de Gap en 2021 est inévitable :
« J’ai demandé au Ministre des Transports, à défaut d’obtenir des travaux d’urgence, que les travaux définitifs de réfection de la ligne Grenoble-Gap commencent en même temps que ceux de la ligne Valence-Briançon (…) malheureusement pour Gap, je ne vois plus que le car ». FAUX : si les travaux sur Grenoble-Gap peuvent être décalés à 2022, le blocus ferroviaire de Gap n’est pas une fatalité. En outre, plus le volume des travaux est lourd, plus leur durée et celle des études préalables est longue, ce qui rallongera la durée de fermeture de ligne. Pourquoi vouloir tout réaliser d’un coup alors que rien ne presse ? Si la première tranche de « travaux urgents » est faite à temps, la ou les tranches suivantes pourront être programmées plus tard. Ainsi sur Valence-Briançon, les travaux ont été programmés en deux tranches. Joël Giraud a répondu au Collectif qu’il souhaite que ces travaux définitifs « puissent débuter pendant ou à la fin des travaux sur la ligne Valence Briançon ».
3. Selon le député, c’est SNCF Réseau qui bloque les travaux :
– « SNCF Réseau change de devis comme de chemise ». FAUX : pour la partie AuRA (qui nécessite l’intervention urgente) les devis sont stables depuis 2016, autour de 50 millions d’euros*. Le député oublie de rappeler que la précision de ces coûts fait l’objet d’une étude en cours. Elle a pris près d’un an de retard… à cause de l’inertie du Gouvernement !
– Les travaux urgents « se feront à perte car il faudrait de toutes façons les reprendre entièrement pour la réfection complète de la ligne ». FAUX : le Collectif a démontré la semaine dernière qu’il n’en était rien.
– « Je ne m’adresse plus à la SNCF ! Ça ne sert à rien sur ce dossier ». FAUX, à moins de penser que le Président de la République vient de désigner un nouveau patron à la tête de l’entreprise exprès pour se mettre des bâtons dans les roues ! C’est bien le cœur du débat : le texte du député (comme son précédent communiqué sur le sujet) expose en long et en large sa propre impuissance et celle du Gouvernement face à une direction de SNCF omnipotente. Cette explication se heurte à la réalité : le Gouvernement est bien l’autorité de tutelle de la SNCF. Sur les ronds points le 9 novembre, c’est à lui que nous nous adresserons pour exiger une décision claire.
* Diagnostics de SNCF Réseau en :
- 2016 : 52 millions
- 2017 : 56 millions
- 2018 : 54 millions + signalisation (non nécessaire à la régénération de la voie) 20 millions
- 2019 : 54 millions + 20 millions signalisation.