Communiqué de presse du 12 avril
Alors que la ligne Grenoble-Gap est fermée depuis mardi 3 avril, le Collectif fait le point. Les « conséquences de la grève » invoquées par la direction SNCF sont largement hors de cause. Les jours travaillés, l’entreprise a le matériel et les personnels pour faire rouler des trains, mais ne les utilise pas.
Elle a fini par avouer. Interrogée par la CGT sur « la fermeture de plusieurs lignes ferroviaires jusqu’à la fin du conflit, même sur les périodes travaillées de 3 jours », la direction TER a « confirm(é) cette situation » par mail cette semaine. Elle aurait été bien en peine de continuer à dénier. En effet, le Collectif de l’étoile ferroviaire de Veynes a pu consulter une série de directives internes à la SNCF qui établissent une décision de fermeture de la ligne Grenoble-Gap pour les trois mois du conflit. L’une d’elles, datée du 3 avril, prévoit ainsi à propos des « X73500 Alpes » (les trains qui desservent la ligne Grenoble-Gap) : « sur toute la durée du mouvement de grève (…) 5 engins sont mis à votre disposition pour couvrir 3 lignes de roulement Chambéry-Ambérieu », et nulle part ailleurs. Un agent chargé de coordonner les circulations à la direction régionale explique : « D’habitude, l’affectation principale de ces trains, c’est la ligne Grenoble-Gap. Là, ils ont fait le choix de les mettre ailleurs ». En outre, ces 5 trains ne sont pas toujours utilisés. Ce mercredi, seuls 3 d’entre eux ont circulé sur Chambéry-Ambérieu, 2 autres restant au dépôt sans aucune raison technique.
Au bas mot 6 trains disponibles et inutilisés
Mais ce n’est pas tout. Le parc comprend au total 15 trains « X73500 ». Alors que la direction invoque les nécessités de « maintenance préventive » pour justifier le maintien au dépôt des 10 trains restants, 8 d’entre eux étaient classés « dispo » cette semaine par le logiciel de maintenance assistée par ordinateur (voir document). Certains d’entre eux ont bien des rendez-vous de maintenance prévus au cours de la première quinzaine d’avril. Mais d’après un cheminot, « on peut très bien décaler un peu les rendez-vous et continuer de faire rouler les trains en attendant ». En tout état de cause, dans un logiciel interne que le Collectif a consulté, 4 trains, stationnés à Chambéry, Gap et Veynes, n’ont aucun rendez-vous de maintenance prévu. Pour la seule journée de mercredi, c’était donc au bas mot 4 trains sans besoin de « maintenance préventive » ainsi que 2 trains affectés à Chambéry-Ambérieu mais non utilisés, soit 6 trains au total qui pouvaient rouler.
D’après ce document interne daté du 10 avril, outre les 5 « X73500 » qui roulent, 8 trains sont indiqués « passé dispo ». GMAO = gestion de la maintenance assistée par ordinateur.
Conducteurs payés pour rester chez eux
L’agent en poste à la direction régionale résume : « en ce moment les jours sans grève, j’ai des trains disponibles, des conducteurs disponibles, mais je ne fais pas rouler les trains ». Un autre cheminot chargé de l’opérationnel confirme : « On a instruction de la direction de respecter le plan de transport, pourtant il y a des moments où on pourrait ajouter des trains par rapport à ce qui est prévu ». Le préavis de grève déposé par Sud rail (qui continue tous les jours) est invoqué par la direction pour justifier la suppression des trains. Mais comme l’ont confirmé nombre de cheminots, y compris au niveau de l’encadrement, les grévistes sont rarissimes voire totalement absents selon les services. Selon l’un d’entre eux, 20 à 30 mécaniciens (conducteurs) ont été « à disposition chez eux » mardi et mercredi au dépôt de Grenoble. Ils étaient encore 17 ce matin. Et comme l’ont confirmé plusieurs sources, quasiment tous ont la capacité de conduire les « X73500 ».
Réouverture envisagée, mais pas programmée
La direction TER indique mardi dans un mail adressé au sénateur Guillaume Gontard qu’elle envisage de « remettre en place des trains dans les prochains jours (échéance envisagée à l’issue des vacances scolaires), une fois que SNCF Réseau nous aura confirmé la possibilité de circuler en toute sécurité sur la ligne ». Une procédure de vérification lourde, nécessitant au moins 5 à 6 cheminots pendant deux jours est en effet nécessaire pour rouvrir la voie qui a fermé pendant plus de 72 heures. Plusieurs services (et notamment des cadres) ont affirmé au Collectif qu’ils avaient demandé à la direction TER de continuer à faire rouler au moins quelques trains pour éviter cette fermeture, sans succès. En fin de matinée ce jeudi, le service concerné de SNCF Réseau n’avait toujours pas reçu de demande officielle pour organiser les vérifications techniques. La direction TER n’a pas répondu au Collectif. Quant à la Région Auvergne-Rhône-Alpes, malgré un mail envoyé dimanche et une relance téléphonique aujourd’hui, elle est restée totalement silencieuse. Une habitude qui ne change pas.
Cars de substitution : dysfonctionnements et défaut d’information
Suite à un appel à témoignage, le Collectif a recensé pas moins d’une dizaine de dysfonctionnements en une seule semaine (du 4 au 11 avril) : 3 cars annoncés et non passés, mettant en incapacité des gens à se rendre à leur travail ; 6 cars avec un retard de 15 à 50 min. Au-delà des inconvénients logistiques – certains réalisent un trajet la veille et se font héberger à Grenoble –, ces retards ne permettent plus d’assurer les correspondances entre les bus Transisère et les cars TER. Certains horaires sont irréalistes et ne prennent pas en compte le rallongement des temps de parcours, notamment au niveau de l’agglomération (détours pour entrer dans les gares et embouteillages).
Information absente, « taxis-TER » supprimés
D’autre part, la SNCF n’assure plus aucun service d’information : aucun affichage n’indique les retards probables, et les personnels pourtant présents dans les gares ne disposent d’aucune information. Les grilles du jour sont annoncées seulement la veille au soir, sans aucune possibilité de prévision sur le moyen terme. Enfin, comme l’ont confirmé aujourd’hui la plateforme de réservation et la compagnie qui assure le service, le taxi à la demande dans le canton de la gare de Clelles-Mens est supprimé pendant toute la durée de la grève, sur décision de la SNCF. Les habitants non motorisés des territoires concernés sont donc privés de tout accès au transport public jusqu’à juin.
« Beaucoup de retard ou absence du car, mais comment savoir ? »
Dans les gares principales, les usagers doivent se battre pour obtenir des taxis de substitution aux… cars de substitution. Dans les gares intermédiaires, l’information fait défaut. Les retards sont quotidiens. Petite revue de détail.
Mercredi 4 avril : Clelles-Grenoble, car de 7h10 absent.
Jeudi 5 avril : Clelles-Grenoble, car de 7h10 absent + Grenoble-Monestier, car de 13h avec 50 minutes de retard.
Samedi 7 avril : Grenoble-Clelles, car de 10h20 jamais arrivé, 1h15 d’attente avant service de taxi de substitution, arrivée à Clelles 12h45 au lieu de 11h15.
Lundi 9 avril : Grenoble-Monestier, car de de 8h10, 15 min de retard. Grenoble-Monestier, car de 16h25, 15 min de retard.
Mardi 10 avril : Clelles-Grenoble, car de 12h41, 35 min d’attente. D’après un voyageur, le car « n’est pas passé ou alors il avait beaucoup de retard. Mais comment savoir ? ».
Mercredi 11 avril : Saint-Georges-de-Commiers-Clelles, car de 17h45, 15 minutes de retard + Saint-Georges-de-Commiers-Grenoble, car de 18h05 : 10 min de retard au départ et 15 min à l’arrivée.