Il ne manque que 1,5 millions pour éviter la fermeture !

Ce jour, le Collectif de l’Étoile ferroviaire de Veynes publie un document et une enquête qui prouvent que la fermeture de la ligne Grenoble-Gap prévue pour décembre 2020 pourrait être évitée. Le Collectif tiendra son assemblée générale le 5 octobre à Veynes pour obtenir (enfin) ces travaux et permettre aux élus et collectivités concernées de s’exprimer publiquement sur ces nouvelles informations.

La ligne Grenoble-Gap doit fermer en décembre 2020. C’est en tous cas ce qu’ont décidé l’État et les Régions Sud-PACA et AuRA en septembre 2018. Et de fait, malgré les discours (volontiers) rassurants mais (toujours) flous du désormais secrétaire d’État aux transports Jean-Baptiste Djebbari lors de sa visite de la ligne en mai dernier, la fermeture s’organise peu à peu*. Coupables de ce scenario perdant : d’un côté l’État et la Région AuRA qui accusent SNCF Réseau de ne pas leur fournir les données techniques ; de l’autre cette dernière qui dit attendre un chèque, tout en laissant pourrir la voie (lire notre enquête). Le Collectif met fin à ce jeu de la patate chaude en publiant ce jour les données techniques. En effet, depuis 2017, les deux institutions ont en mains un diagnostic précis de la situation, pointant les zones de travaux les plus urgents, avec un budget détaillé. A l’époque, elles ont sciemment décidé de ne rien faire. Pourtant, la somme permettant d’éviter la fermeture est dérisoire : il ne reste que 1,5 millions d’euros à trouver !

2020 : une fermeture prématurée
La zone à risque ne concerne que 5,2 kilomètres de voie, situés à la hauteur de Saint-Martin-de-la-Cluze (en Isère, près de Monestier-de-Clermont). Le montant total des travaux est évalué à 4,8 millions d’euros. Le calcul est rapide : Grenoble Alpes Métropole a déjà voté 2 millions d’euros de travaux, et le Département de l’Isère, 1,3 millions pour la période 2020-2021. Mais ce n’est pas tout : d’après la direction de SNCF, après décembre 2020, il faudrait procéder à un « arrêt d’exploitation pour des raisons de sécurité ». Or l’affirmation ne tient pas debout : l’ensemble des cheminots spécialistes de la ligne contactés par le Collectif, cadres compris, expliquent au contraire que des ralentissements drastiques vont être mis en place à la fin de l’année pour freiner la dégradation de la voie et éviter ce scenario (lire notre enquête). Tous ont également confirmé que des mesures correctives, comme des changements de traverses sont toujours possibles en cas de « gros pépin », pour faire durer la voie. Par deux fois, la direction de SNCF Réseau à Lyon a d’ailleurs admis à demi-mot que la fermeture prévue pour fin décembre 2020 est plus une réaction à l’inaction des institutions qu’une véritable échéance technique. En juillet, face à l’État et à la Région, elle a ainsi expliqué que sa position « ne sera pas infléchie tant que les perspectives de financement ne seront pas éclaircies ».

Des travaux possibles rapidement
Or un scenario constructif, permettant d’éviter toute fermeture pourrait tout à fait être envisagé. En 2020 (comme tous les ans), la ligne va être suspendue cinq à six semaines pour travaux en juin-juillet pour la réalisation de travaux à Vif. Cette période pourrait être mise à profit pour faire les travaux de Saint-Martin-de-la-Cluze. S’il était trop tard, rien n’empêche le report de la fermeture prévue pour la fin d’année 2020 au mois de juin 2021 pour les mettre en œuvre. Quoi qu’il en soit, une fermeture en décembre est une aberration : les travaux ne débuteront sûrement pas en hiver, sous la neige. La ligne rouvrirait immédiatement ensuite, le temps que les autres travaux nécessaires soient programmés les années suivantes. La direction de SNCF Réseau met parfois en avant des contraintes d’effectifs pour expliquer qu’elle ne peut pas prévoir de travaux rapidement. Mais en juillet dernier, elle a reconnu qu’elle se plierait aux arbitrages des institutions : « nous n’avons jamais refusé le montage d’une solution financière pour des raisons industrielles ». Les partenaires financiers et en particulier l’État doivent donc cesser d’attendre les études globales pour lancer les travaux les plus urgents : lorsqu’un réseau de gaz fuit, on répare la fuite, on n’attend pas de rénover tout le réseau !

Éviter le blocus ferroviaire des Hautes-Alpes
Car en l’absence de report de la fermeture et sans réalisation des travaux urgents, le lancement de l’ensemble du renouvellement des voies attendrait la Saint-Glinglin. Cet été, le directeur de SNCF Réseau à Lyon a été très clair : « aujourd’hui nous travaillons sur le portefeuille 2023, les années précédentes sont saturées ». Il va sans dire qu’une telle fermeture serait une catastrophe pour les usagers du train et pour le développement économique et touristique des territoires traversés. Dans les Hautes-Alpes, c’est un véritable blocus ferroviaire qui est à craindre en 2021 : les travaux sur la ligne vers Valence vont durer neuf mois pendant lesquels ni les TER ni le train de nuit ne pourront circuler. Ce dernier pourrait pourtant transiter par Grenoble. Dans le Trièves, d’importants aménagements auront lieu sur la route départementale parallèle à la voie ferrée jusqu’en 2022. Enfin, à Grenoble, les travaux du « Rondeau » sont prévus également jusqu’en 2022 et vont aggraver l’engorgement de la métropole. L’État, qui d’une main pilote ces travaux pharaoniques, va-t-il de l’autre empêcher tout report modal, juste au moment où les territoires en auront le plus besoin ? Pour s’assurer que les travaux aient enfin lieu, et pour permettre aux différents élus et collectivités de s’exprimer sur ces données nouvellement rendues publiques, le Collectif organise son assemblée générale le 5 octobre prochain à Veynes.

* Le projet de SNCF Réseau d’interrompre les circulations entre les gares de Clelles et Veynes dès le mois de décembre 2019 (notre communiqué du 11 juillet), dernier avatar des attaques de l’entreprise contre la ligne, n’est pas encore arbitré à l’heure où nous publions. En outre, l’entreprise met en branle les grandes manœuvres dans certains services pour redéployer les quelques dizaines d’agents qui travaillent sur cette ligne.